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Description : 264 pages
Type de document : Livre imprimé
Niveau: 2e cycle du secondaire, Cégep
Biographie de l’auteur
Jean-Pierre Gorkynian est un romancier et scénariste québécois d’origine syrienne. Il est né à Montréal en 1986. Il s’intéresse aux enjeux identitaires liés à l’immigration. Son premier roman 1 1 1 Rescapé Jean-Pierre Gorkynian, Rescapé, VLB Éditeur, 2015, 144 pages. a été finaliste pour le Grand prix littéraire Archambault et le prix du Premier roman de Chambéry. Son deuxième roman Tireur embusqué est publié chez Mémoire d’encrier en 2020 et en 2021 a été finaliste au Prix littéraire des collégiens.
Résumé de l’œuvre
Shams, adolescent rescapé de la guerre en Syrie, vit son premier hiver à Montréal chez sa tante Mahboubeh, loin de sa famille restée à Alep, sa ville d’origine qui a été ravagée par la guerre. Cette séparation est perçue par Shams comme un geste de lâcheté et d’abandon. Le sentiment de culpabilité qui en découle le rongera tout au long du roman.
Après s’être battu à l’école pour une fille, Julie, il consent à suivre une psychothérapie durant laquelle il finit par s’ouvrir. Il raconte au psychologue les atrocités dont il a été témoin, la blessure mentale que la guerre a laissée en lui.
Il se lie d’amitié avec Kevin, un adolescent québécois meurtri par une bulle familiale éclatée où la violence domestique le fragilise. Avides de drogue, de sexe et de musique, Kevin et Shams sillonnent ensemble les rues enneigées de la ville dans laquelle ils essayent de trouver leur place.
Situer l’œuvre
Le printemps arabe
La guerre en Syrie a commencé en 2011, dans la foulée des révolutions dites du «Printemps arabe», qui avaient traversé plusieurs pays du monde arabe, notamment la Tunisie, la Libye, l’Égypte, le Bahreïn et le Yémen.
Le monde arabe, un groupe homogène?
Le monde arabe n’est pas un territoire homogène regroupant des peuples identiques. Le monde arabe englobe une vingtaine de pays de la péninsule arabique, du Proche-Orient et du nord de l’Afrique. Si les pays du monde arabe partagent la langue arabe comme langue officielle ou co-officielle, d’autres lan- gues existent et sont utilisées quotidiennement.
L’islam est la religion qui prédomine dans ces pays, mais ce n’est pas la seule. Il y a des Arabes chrétiens, juifs, zoroastriens, babistes, etc.
La guerre en Syrie
Bachar El-Assad arrive au pouvoir en juillet 2000, succédant ainsi à son père Hafez El-Assad, qui a été président de la Syrie pendant 30 ans. Progressive ment, Bachar transforme le pays en un régime autoritaire par des réformes gouvernementales.
Malgré certaines réformes économiques et l’émergence d’une classe moyenne, les Syriens habitant les zones rurales ne voient pas leur niveau de vie augmenter et le mécontentement commence à se faire sentir. C’est 30 % de la population qui vit sous le seuil de la pauvreté.
En 2006, une goutte d’eau fait déborder le vase. Une sécheresse sans précédent touche le pays et fait perdre plus de 86 % des récoltes agricoles. Cette situation plonge le pays dans une crise économique et oblige les familles d’agriculteurs à se déplacer en périphérie de Homs et Damas dans des conditions précaires. La sécheresse qui dure quatre ans fait gonfler la colère des Syriens. Cette crise écologique vient exacerber la colère et le peuple ne supporte plus de vivre dans une dictature où la liberté d’opinion et d’expression ne sont pas des droits acquis
Après la chute de Ben Ali en Tunisie et de Moubarak en Égypte, des adolescents taguent « Ton tour arrive, docteur », faisant référence au président syrien, sur les murs de la ville de Deraa. Ils se font arrêter par les services de sécurité et torturer. Ce sera l’événement qui fait tout basculer.
Ce qui a commencé comme une révolte populaire contre le gouvernement réprimant toute tentative de soulèvement s’est vite transformé en conflit international, par l’implication directe de différents acteurs mondiaux.
L’émergence de groupes djihadistes et terroristes, notamment le front Al-Nosra ainsi que l’État islamique (Daech) parmi les forces rebelles font dériver la situation vers une radicalisation religieuse de la guerre. Ces multiples récupérations politiques et religieuses font naître chez le peuple syrien un sentiment de dépossession de leur cause.
Cette guerre qui entre dans sa onzième année a fait jusqu’à aujourd’hui, plus d’un demi-million de morts. L’Organisation des Nations unies note 13,5 millions de déplacés, dont 5,6 millions de réfugiés ayant quitté le pays. Cela constitue la plus grande population de réfugiés au monde.
Thématiques – enjeux
Le roman d’apprentissage
Le roman d’apprentissage (aussi appelé roman d’initiation) est un genre litté- raire romanesque, où le héros, souvent un adolescent, quitte le foyer familial, passe à travers diverses péripéties, en tirant des leçons de vie, une meilleure compréhension du monde et de soi 2 2 Demian de Herman Hesse (Livre de Poche, 1997), L’ombre de l’olivier de Yara El-Ghadban (Mémoire d’encrier, 2011), L’attrape-coeurs de J. D. Salinger (Robert Laffont, 2016), Washington Black d’Esi Edugyan (Gallimard, Folio, 2020), L’oeil le plus bleu de Toni Morisson (10/18, 2008), Rue Deschambault de Gabrielle Roy (Boréal, 1993), Persepolis de Marjane Satrapi (L’Association, 2017). . La narration est donc centrée sur l’évolu- tion du héros ou de l’héroïne, découvrant tantôt ses premiers émois amoureux, tantôt un pays nouveau et confrontant parfois la mort dans son voyage. Le récit se termine avec le protagoniste principal grandi d’une sagesse nouvelle.
Voici quelques critères du roman d’apprentissage :
- la rétrospective sur l’enfance, la jeunesse, les événements passés
- le jeune adulte ou l’adolescent
- l’apprentissage (au sens large du terme), l’initiation
- l’opposition au monde (le héros quitte son foyer familial…)
- l’absence d’un parent ou d’une figure parentale
- les premières expériences (drogue, amour, sexe, nouvelle ville, amitié…)
- les péripéties (des événements par lesquels le héros passe, peut-être unemort symbolique)
- l’accomplissement du protagoniste principal, la réconciliation avec le monde
Exemples d’activités
- Relevez des éléments dans le livre qui permettent d’indiquer qu’il s’agit d’un roman d’apprentissage.
- Comparez le langage du corps de Shams à Alep et à Montréal. L’adoles- cent occupe-t-il l’espace de la même manière dans ces deux villes diffé- rentes?
- Qu’en est-il du sentiment d’appartenance? Shams arrive-t-il à s’appro- prier les villes? Vous sentez-vous appartenir à la ville où vous habitez?
Le rapport à l’autre
En quoi être arabe expose-t-il l’individu à des stigmatisations? Donnez des exemples à partir du roman.
Exemple :« Les regards sont tournés vers moi. Tous veulent m’entendre parler de l’exil. » (p. 25).
- En quoi le personnage de Julie reflète-t-il une fétichisation de Shams?
- S’agit-il de voyeurisme?
- Dans quelle mesure représente-t-elle une critique d’un certain activisme occidental?
Esthétique de l’œuvre
L’esthétique d’une œuvre est la forme par laquelle les mots sont inscrits pour tisser une histoire. L’auteur·trice aura recours à des procédés, une prose et ces motifs (façons de faire) seront répétés à travers l’œuvre en question, voire tout le travail d’écriture de l’auteur·trice. C’est ainsi que nous pouvons reconnaître « une voix », « une signature », c’est-à-dire reconnaître la texture d’une plume.
a) Extrait :
«Puis soudain, un cri étouffé. Ce son m’est familier. Je l’ai entendu maintes fois. La vie qui se déchire. C’est le cri qui précède tout juste la défaite. Un corps s’effondre sur la pelouse enneigée, à côté de moi. Une masse parcourue de spasmes. Un sniper vient de… mais d’où vient le tir ? » (Tireur embusqué, p. 11)
Quelle est la fonction des trois points de suspension dans la dernière phrase?
b) À plusieurs reprises (avec le psychothérapeute, avec Kevin, pendant ses rêveries), Shams commence à narrer un souvenir au passé, puis transitionne vite vers le présent de l’indicatif. Comment expliquer ce change- ment de temps? Quel rapport entretient Shams avec son moment présent? Relevez trois exemples.
Glossaire
Discrimination
« La discrimination (…) est définie comme un traitement différent, qui prend la forme d’une distinction, d’une restriction ou d’une préférence, exercé par un individu ou une organisation, sur la base (des caractéristiques)d’une personne. 3 3 Le racisme systémique… parlons-en !, Ligue des droits et libertés, 2022 (PDF) » Il s’agit donc d’un acte. On peut dire qu’elle est la conséquence des préjugés et stéréotypes. Lorsqu’une personne agit selon les préjugés et stéréotypes, les actions qu’elles mènent seront discriminatoires.
Masculinité toxique
« La masculinité toxique n’implique pas que les hommes soient toxiques ni que la masculinité en soi est toxique. Le concept renvoi plutôt au machisme, et aux stéréotypes de l’homme « traditionnel », c’est-à-dire de l’homme comme étant dominant dans la société. Cette masculinité serait toxique, car elle offre une image étroite de ce que c’est être un homme et s’insère dans une culture qui survalorise l’autonomie chez les garçons, normalise l’agression et l’intimidation et exige aux hommes de prouver leur masculinité en tout temps. Ce type de socialisation crée aussi des conflits entre les rôles masculins et féminins, nourrit l’homophobie et encourage la compétition entre hommes. Par conséquent, cette forme de masculinité serait néfaste sur deux plans. D’abord sur le plan identitaire, car elle impose des comportements, des stéréotypes et des mentalités qui peuvent nuire à l’estime de soi, au sentiment de compétence et au sentiment d’appartenance, et ensuite sur le plan relationnel, car elle restreint l’intimité, les liens sociaux et les relations interpersonnelles 4 4 « La masculinité toxique, un obstacle à la santé mentale des hommes ? », Association canadienne pour la santé mentale, 2021. ».
Préjugé
« Le mot préjugé vient du latin praejudico, qui signifie « juger d’avance ». On l’associe souvent à une idée reçue ou à une croyance au sujet d’individus et de groupes qui peut avoir ou ne pas avoir un fondement raisonnable ou réel. Si le préjugé renvoie à la croyance, la discrimination renvoie à l’action qui en résulte. Et c’est l’accumulation au fil des jours, des années et des générations, d’actes quotidiens de discrimination – petits et grands, conscients et inconscients – qui rend possibles le soutien et l’entretien d’un rapport de pouvoir déséquilibré entre les groupes dominants et non dominants 5 5 Shakil Choudhury, Vivre la diversité, Éditions Mémoire d’encrier, 2018. ».
Racisme
« Il s’agit d’une idéologie fondée sur la hiérarchisation des groupes humains, à partir du concept de la « race », une classification sociale et politique des gens basée sur des caractères comme leur couleur de peau ou leurs origines. Le racisme peut être ordinaire (les préjugés inconscients que l’on porte sur des groupes), individuel (paroles, actes, micro-agressions qu’ils soient conscients ou non), systémique ou institutionnel (oppressions vécues par une collectivité dans divers domaines comme la justice pénale, la santé, l’éducation, le logement, etc). 6 6 Amel Zaazaa, Introduction aux perspectives antiracistes, ATOPOS, Centre collégial de développement de matériel didactique (CCDMD), 2021.
Stéréotype
« Nos croyances à partir des groupes sociaux occupent des zones visibles et invisibles de notre conscience. Le mot stéréotype désigne communément ces croyances. Il s’agit de généralisations sur un groupe, fondées parfois sur un brin de vérité, d’autres fois sur une réalité exagérée, voire même sur un pur mensonge, qui tendent, consciemment ou inconsciemment, à placer les membres d’un groupe dans une catégorie au mépris des différences individuelles. C’est percevoir une personne comme symbole d’un groupe plutôt que comme individu.
Certains stéréotypes sont assez évidents et déclarés (par exemple les amants latinos, les femmes au foyer versus les hommes comme soutien de famille). En revanche, les stéréotypes implicites sont plus subtils. Ils sont exposés par les circonstances, surtout quand des croyances passées sous le radar sont tout à coup confrontées. 7 7 Shakil Choudhury, op.cit. »
Ressources
Pour mieux comprendre la guerre en Syrie
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Films
- El-Kateab, Waad et Edward Watts, Pour Sama, KMBO, 2019.
- Mohamad, Oussama et Wiam Simav Bedirxan, Eau argentée, Syrie auto-portrait, Les Films d’ici et Proaction Film, 2014.
- Labaki, Nadine, Capharnaüm, Mooz Films, Cedrus Invest Bank, Doha FilmInstitute, Les Films des Tournelles, 2018.
- Rutikara, Justice, La cité des autres, Les Productions du Rapide-Blanc, Parallaxes, 2021.
À lire
- Sattouf, Riad, L’arabe du futur, Allary Éditions, 2014.
- Toulmé, Fabien, L’Odyssée d’Hakim, Éditions Delcourt, 2018.
- Soleimane, Omar Youssef, Le dernier Syrien, Éditions Flammarion, 2020.
Crédits
L’Espace de la diversité reconnaît l’aide financière, du Conseil des Arts du Canada, du Conseil des arts et des lettres du Québec, du Conseil des arts de Montréal, de la Société de développement des entreprises culturelles et de la Fondation Lucie et André Chagnon.
- Conseillère-experte en littérature : Lorrie Jean-Louis
- Coordination : Selma Guessous
- Recherche et rédaction : Emné Nasereddine
- Révision linguistique : Laurence Poulin
- Conception graphique et mise en page : Alejandra Núñez
Espace de la diversité
1260, rue Bélanger, bur. 201
Montréal, Québec, H2S 1H9
Tél. : 438-383-2433
www.espacedeladiversite.org
Livres connexes
Fiche de lecture 
- 1 1 Rescapé Jean-Pierre Gorkynian, Rescapé, VLB Éditeur, 2015, 144 pages.
- 2 Demian de Herman Hesse (Livre de Poche, 1997), L’ombre de l’olivier de Yara El-Ghadban (Mémoire d’encrier, 2011), L’attrape-coeurs de J. D. Salinger (Robert Laffont, 2016), Washington Black d’Esi Edugyan (Gallimard, Folio, 2020), L’oeil le plus bleu de Toni Morisson (10/18, 2008), Rue Deschambault de Gabrielle Roy (Boréal, 1993), Persepolis de Marjane Satrapi (L’Association, 2017).
- 3 Le racisme systémique… parlons-en !, Ligue des droits et libertés, 2022 (PDF)
- 4 « La masculinité toxique, un obstacle à la santé mentale des hommes ? », Association canadienne pour la santé mentale, 2021.
- 5 Shakil Choudhury, Vivre la diversité, Éditions Mémoire d’encrier, 2018.
- 6 Amel Zaazaa, Introduction aux perspectives antiracistes, ATOPOS, Centre collégial de développement de matériel didactique (CCDMD), 2021.
- 7 Shakil Choudhury, op.cit.